Sébastien Brameret, maître de conférences de droit public : "Il a fallu très rapidement basculer les cours en ligne"

le  16 avril 2020
Sébastien Brameret, maître de conférences à la faculté de droit
Sébastien Brameret, maître de conférences à la faculté de droit
Sébastien Brameret est maître de conférences à la faculté de droit, spécialiste en droit administratif, ses recherches portent notamment les relations de l’État avec les administrés et les relations des administrations entre elles.

Plus précisément, je travaille sur l’action économique des personnes publiques (aides publiques, actionnariat d’entreprises, etc.). Autant dire que je vais avoir du travail dans les prochains mois, vues les difficultés économiques qui vont suivre le confinement et les débats actuels sur la place et le rôle de l’État dans l’économie. 

Qu'est-ce qui a changé dans votre façon de travailler depuis le confinement ? 

Peu et beaucoup de choses à la fois… 

Peu, car la recherche en droit est une activité assez solitaire et ne nécessite pas de matériel ni de laboratoire dans lequel travailler quotidiennement. Avec un ordinateur et une connexion internet, nous pouvons même nous passer temporairement de BU ! Les progrès dans la numérisation des ressources réalisées ces 10 dernières années ont considérablement modifié notre façon de faire de la recherche. 

Ainsi, je travaillais déjà principalement chez moi avant le confinement, hormis pour les cours et les tâches administratives. Je peux donc parfaitement continuer mes recherches, ou les adapter aux circonstances du Corovanirus en écrivant à ce propos, par exemple cet article pour le Journal du droit administratif ou en intervenant en visioconférence.

Mais beaucoup de choses ont changé en même temps ! D’une part il n’y a plus de cours en présentiel et il a fallu très rapidement basculer en ligne les cours et assurer le suivi des étudiant(e)s, notamment via Moodle ou Instagram. De ce point de vue, je trouve que nous avons collectivement plutôt bien réagi à la crise : l’ensemble de mes cours était par exemple en ligne avant la fin de la première semaine, les TD ont eu lieu, de même que les examens de TD. Il ne reste plus que la question des examens terminaux, mais nous travaillons sur cette question.

D’autre part, j’ai deux jeunes enfants (3 et 4 ans) et la vie en confinement avec des enfants se conjugue mal avec le (télé)travail… Il a fallu aménager nos horaires de travail, principalement en en réduisant le nombre. Les délais d’écriture se sont donc particulièrement rallongés, car il a fallu faire face à toutes les autres priorités (en particulier celles liées à la continuité pédagogique) !

Vie de famille

Comment maintenez-vous le lien avec vos collègues et étudiants ?

Ces liens se sont réduits à la portion congrue… Quelques réunions sur Zoom, notamment pour continuer à travailler sur un projet de nouvelle formation à destination des élus locaux. Finalement, mon principal canal de discussion avec mes collègues est devenu Facebook (et quelques "apéros-WhatsApp" dont je ne dirai pas davantage !). Je pense que les étudiant(e)s ne se rendent pas nécessairement compte des discussions (souvent enflammées) que l’on peut y tenir, au sujet de la loi de l’état d’urgence, des dernières jurisprudences du Conseil d’État, des mesures de relance nécessaires, etc.

Plus globalement, je crois qu’il y a une réelle inquiétude d’une part assez large de la communauté scientifique (du moins des enseignants-chercheurs que je côtoie) quant à l’étendue, l’importance et la durée des limitations qui ont été (pour certaines très légitimement et d’autres beaucoup plus discutables) portées aux droits fondamentaux (libertés d'aller et venir, d’entreprendre, de réunion, etc.) depuis la mi-mars. Je pense que nous verrons fleurir dans les prochains mois les initiatives de colloques, à l’image du premier, réalisé virtuellement il y a quelques semaines, notamment à l’initiative de Serge Slama, professeur de droit public à l'Université Grenoble Alpes.


Qu'est-ce qui est le plus difficile ? Qu'est-ce qui vous manque le plus ?

Habitant en appartement en centre-ville, je dirais les espaces verts et la montagne… Nous n’avons pas de balcon, du coup le temps est parfois long entre deux sorties, que nous limitons drastiquement pour les enfants.

Vos astuces pour vous organiser ? 

Nous avons essayé de caler une « journée-type » nous permettant de nous occuper des enfants, de travailler et de conserver quelques moments de détente ! Sans entrer dans le détail, l’idée est de continuer à faire un semblant d’école avec les enfants et de se réserver des après-midi de travail, ce qui suppose d’empiéter assez largement sur les week-ends… 

Vie de famille

Comment parvenez-vous à compartimenter vie professionnelle et vie personnelle puisque tout se joue dans un même espace ?

Nous avons la chance d’avoir une « pièce secrète » ! Plus sérieusement, l’appartement est au dernier étage et les anciens propriétaires avaient acheté l’un des greniers, relié au reste de l’appartement par un escalier. Nous avons donc notre espace de travail à l’étage.

Espace de travail

Comment faites-vous pour décompresser ? Vous évader ?

J’essaie de continuer à courir 1 à 2 fois par semaine. Au début j’étais assez réticent à l’idée de ne plus pouvoir aller en montagne ou faire du vélo, mais l’absence de voitures rend la ville assez agréable à arpenter. Moins de pollution, pas de bruit… Je pourrais rapidement m’y habituer ! Cela réduit un peu l’effet « hamster tournant dans la boule ». 

La première chose que vous ferez une fois le confinement terminé ?

Je ne sais pas. Cela dépendra du niveau de déconfinement. Il ne sera très probablement pas possible de retourner voir mes parents, qui sont dans la catégorie des personnes « à risque ». Donc un pique-nique en montagne ?
Publié le  16 avril 2020
Mis à jour le  16 avril 2020